Pour Ferle, la peinture est un « moment » qui justifie à lui seul le geste de l’artiste, physiquement mobilisé par la composition de son oeuvre. Ses toiles nous invitent à abandonner toute référence connue pour nous laisser submerger par la spiritualité dont elles sont chargées.
« C’est non-figuratif, mais nullement informel. » Voilà comment Ferle elle-même décrit ses toiles aux dimensions parfois gigantesques (jusqu’à 2,80m de hauteur), composées de « motifs répétés dans une symétrie irrégulière », interrompus par un « décrochement ».
De fait, le spectateur confronté à ces compositions abstraites cherche d’abord une ressemblance. Ce « décrochement » dont parle l’artiste, est-ce une frontière ou un horizon ? Ce rouge si intense représente-t-il un ciel flamboyant ? Et ce noir si profond, un gouffre ? Mais très vite, l’esprit se laisse happer par cet étrange vis-à-vis. Commence alors une plongée (ou est-ce un envol ?) dans les profondeurs de la toile. Ceux qui, comme l’historien d’art et commissaire d’expositions Emmanuel Daydé, ont pris le temps de ce voyage comparent les œuvres de Ferle à des « portes (ouvrant) sur l’infini, vers une sorte de spiritualité issue du corps lui-même. »
Il y a, à n’en pas douter, une forme de spiritualité dans sa peinture, alors même que l’acte de peintre exige de sa part une totale implication physique. L’artiste commence par disposer des feuilles blanches à même le sol, sur lesquelles elle projette ensuite des encres de Chine au pinceau : « c’est de l’énergie qui se construit, qui se dispose par rapport à une surface » dit-elle.
Pas étonnant dès lors que Ferle fasse le parallèle avec une activité physique lorsqu’on lui demande pourquoi elle peint : « On dessine ou on peint parce qu’on ne peut pas s’en empêcher, comme on aime marcher pour marcher et non pas pour aller quelque part. » Ce « moment » de la peinture, qui est « une façon d’être quelqu’un d’autre qui est vraiment soi », serait donc l’expression d’un impératif que l’artiste ne cherche pas à rationaliser. Sa peinture DOIT être. . . Ainsi soit-elle.
